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Il exulte, le bernard-l'hermite, dans les coulisses :
Côté jardin la salle est comble, c'est la féerie !
Les trois coups du bâtonnier retentissent,
Le rideau s'élève dans les cieux, c'est parti !
Une magnifique broche prend ses aises dans son écrin,
Un compartiment de première classe pour aller sur les chemins.
Il y a du roulis, du tangage,
Au rythme des traverses, le train s'engage.
Arrive le contrôleur : « Billets siou plait Madame »
Notre broche minaude, elle fouille dans son sac à main,
En sort un tube de gouache et un petit miroir.
Alors, surprise, elle se pâme :
« Suis-je bête, je l'ai laissé à la gare,
Sur le guichet, gare d'Estaing ! »
Puis calmement elle se remaquille,
Se pomponne en battant des sourcils.
Le contrôleur en a vu d'autres, il en a cure,
Se tourne vers la sortie, en route pour d'autres aventures.
Moralité : A gare d'Estaing, rien d'impossible !
Hagard destin ? C'est bien possible.
Le bernard l'hermite fait son entrée. Applaudissements.
Le contrôleur : « monsieur, vos billets, prestement »
L'ermite se renfrogne, rentre dans sa coquille, en douce.
On l'entend vaguement marmonner dans ses moustaches :
« Billets, billets, funeste potache...
Ai-je une tête à prendre des billets ? Pov' mec. »
L'agent sort alors sa boite de fruits secs
Et lui donne une amande douce.
Bernard a du savoir-vivre, c'est la moindre des choses,
Face à la broche, sans détours, il lui propose :
« Puis-je vous offrir mon amande, Aline ? »
« Merci bien, sans façon, car je surveille ma ligne »
Et bien lui en prit, car au bout de l'hameçon
Gesticulait un hareng, triste sort.
Une fois le poisson remonté à bord,
Il s'enquit de la destination
Et s'installa dans le compartiment.
La broche, d'humeur poète, s'adresse alors au hareng :
« Vous prendrez bien un petit vers ? »
« Merci, mais l'éviter, de loin, je préfère
Car voyez-vous, pour ce qui est du ver, j'ai déjà donné »
Et le hareng sort... pour fumer.
Un vieux porte-monnaie, grippe-sous à la peau burinée,
Vint s'asseoir à côté du bernard l'ermite.
Il raconta qu'il était désœuvré depuis le crack boursier
Il partait faire une somptueuse croisière en paquebot,
Vers la lointaine destination d'Acapulco ;
Alors on n'allait pas pleurer sur sa soi-disant faillite !
Le hareng était de retour,
Il avait entendu son discours.
Dans un coin, un crayon ne payait pas de mine.
Le contrôleur, quant à lui, était revenu, rieur.
Aline la broche et Bernard l'ermite, en chœur,
Tous entonnèrent de vieilles chansons de marine,
Le porte-monnaie, déridé, chantait d'une voix crue,
Lors le crayon participa à cette chorale impromptue,
Le hareng sifflait, le fonctionnaire rangea son cartable,
La nuit sera courte et le voyage agréable.
La lune se lève, les étoiles scintillent, tombe la nuit.
Le rideau aussi.
Quelques critiques :
SMIC'ART' : Il nous a semblé abusif de payer plein tarif pour voir une pièce trouée au théâtre de cinq sous.
MACHINOTS : L'action est menée d'un bon train...
BELLE & REBELLE : Soulignons au passage l'excellent travail des maquilleuses.
OXYGENE : Merci au souffleur.
Badmojo, troubadour de l’obsolète